🌳 Quand les arbres avertissent : un feuillage plus vert peut-il prédire une éruption volcanique ?

 🌳Quand les arbres avertissent : un feuillage plus vert peut-il prédire une éruption volcanique ?

Et si la couleur des forêts était le premier signe d’un volcan en colère ? Des satellites l’affirment : avant une éruption, les arbres deviennent plus verts. Pourquoi ? Et peut-on s'y fier ?

 


⚡ Un signal vert venu des volcans ?

Sur les pentes boisées du volcan Rincón de la Vieja, au Costa Rica, une étrange observation a attiré l’attention des scientifiques de la NASA : les arbres, au lieu de mourir sous la chaleur, deviennent plus verts, plus feuillus. Ce phénomène n’a rien d’anecdotique. Il pourrait constituer un indicateur précoce d’éruption volcanique, mesurable depuis l’espace.

À mesure que le magma remonte dans la croûte terrestre, il libère une grande variété de gaz. Parmi eux, le dioxyde de carbone (CO₂), invisible et inodore, mais détectable dans ses effets biologiques. En s’accumulant dans le sol, ce gaz est absorbé par les racines et stimule la photosynthèse : les feuilles deviennent plus riches en chlorophylle, donnant un feuillage plus dense et d’un vert profond.

🔬 Quand la photosynthèse révèle le magma

Ce que les satellites observent en réalité, c’est l’indice de végétation (NDVI), une mesure de la santé des plantes. Or, cet indice augmente notablement autour de certains volcans peu avant une éruption. C’est le cas par exemple du Mont Etna, où des chercheurs ont relevé 16 pics de verdissement correspondant à des phases de recharge magmatique.

Ce n’est pas que les arbres sentent le danger. C’est qu’ils profitent temporairement d’un excès de CO₂, avant que l’éruption ne vienne bouleverser leur écosystème. Ce comportement a été confirmé sur plusieurs espèces tropicales et méditerranéennes, comme Alnus acuminata ou Buddleja nitida, dont la chlorophylle augmente sous l’effet du CO₂ volcanique.

🌍 Observer les forêts depuis l’espace

À cause de leur localisation isolée, nombre de volcans restent peu surveillés. Les satellites comme Landsat 8, Terra (NASA) ou Sentinel-2 (ESA) offrent alors une solution : ils permettent de suivre l’évolution du couvert végétal à large échelle.

Mais attention : les satellites ne détectent pas directement le CO₂. Le dioxyde de soufre (SO₂), plus réactif, peut être repéré, mais le CO₂ reste noyé dans les concentrations atmosphériques globales. Le feuillage devient alors un indicateur indirect, comme un capteur naturel d’origine biologique.

Des campagnes comme AVUELO, menée par la NASA, visent à valider cette approche sur le terrain, en survolant les zones actives avec des instruments hyperspectraux. Les résultats, prometteurs, ouvrent une voie nouvelle : combiner imagerie satellite et réponses écophysiologiques pour anticiper les crises volcaniques.

⚠ Une méthode prometteuse, mais imparfaite

Ce verdissement ne concerne pas tous les volcans, ni toutes les forêts. Plusieurs limites subsistent :

  • Certaines espèces ne réagissent pas au CO₂ de la même façon.

  • D’autres facteurs peuvent colorer les feuilles (maladies, météo, saisons).

  • La couverture nuageuse ou la résolution des images peuvent fausser les données.

Il ne s’agit donc pas de remplacer les sismographes ou les capteurs de gaz, mais bien d’ajouter un outil supplémentaire à la panoplie de surveillance volcanique. Le but ? Mieux protéger les 800 millions de personnes vivant près d’un volcan actif.

🌐 Des volcans à la planète toute entière

L’idée ne s’arrête pas aux volcans. En étudiant la façon dont les arbres absorbent le CO₂ magmatique, les scientifiques cherchent aussi à comprendre comment les forêts du futur réagiront à une atmosphère enrichie en CO₂. Car ce gaz, principal moteur du changement climatique, modifie déjà la croissance des végétaux.

Le verdissement volcanique devient alors une fenêtre sur le futur : comment les écosystèmes répondent-ils à des conditions extrêmes ? Peut-on s’en inspirer pour modéliser l’évolution des forêts dans un monde à +2°C ou +3°C ?

📆 Et demain ?

Le suivi du verdissement par satellite est encore en phase de validation. Mais les premiers résultats, de l’Etna au Costa Rica, montrent que la végétation peut être un indicateur sensible des éveils volcaniques. Mieux : les arbres, par leur réaction, peuvent nous alerter avant que la terre ne tremble.

Un jour peut-être, les forêts elles-mêmes seront nos meilleurs détecteurs de catastrophes naturelles.


Sources principales : NASA, Sentinel Hub, Geophysical Research Letters, Guinn et al. 2024, Bogue & Fisher 2023, Mission AVUELO.


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