đź’° Et si votre vieux smartphone valait de l’or ?
đź’° Et si votre vieux smartphone valait de l’or ?
Une Ă©quipe australienne a mis au point un procĂ©dĂ© innovant pour rĂ©cupĂ©rer l’or des dĂ©chets Ă©lectroniques sans polluer la planète. Explications d’une rĂ©volution silencieuse mais capitale.
📦 Pourquoi nos tiroirs dĂ©bordent d’or (sans qu’on le sache)
Ă€ quand remonte la dernière fois que vous avez ouvert le tiroir fourre-tout de votre salon ? Celui oĂą s’accumulent câbles obsolètes, anciens tĂ©lĂ©phones et chargeurs dĂ©pareillĂ©s ? Derrière cet apparent dĂ©sordre se cache une mine d’or insoupçonnĂ©e : les composants Ă©lectroniques que nous jetons contiennent de petites quantitĂ©s de mĂ©taux prĂ©cieux, en particulier de l’or. Selon plusieurs Ă©tudes, un seul kilogramme de circuits imprimĂ©s peut contenir entre 200 et 900 milligrammes d’or, bien plus que certains minerais exploitĂ©s dans les mines traditionnelles.
Avec 62 millions de tonnes de dĂ©chets Ă©lectroniques produits dans le monde en 2022, en hausse de 82 % depuis 2010 (donnĂ©es ONU), l’enjeu est immense. Pourtant, moins d’un quart de ces dĂ©chets est recyclĂ© correctement. Et les procĂ©dĂ©s industriels actuels posent de sĂ©rieux problèmes.
☠️ Extraire l’or : un processus encore toxique
Jusqu’Ă rĂ©cemment, rĂ©cupĂ©rer l’or prĂ©sent dans les appareils usagĂ©s impliquait des mĂ©thodes aussi efficaces que nocives. Les plus utilisĂ©es sont la lixiviation au cyanure ou l’utilisation de mercure. Ces techniques, courantes dans l’industrie minière, sont extrĂŞmement toxiques pour l’environnement et la santĂ© humaine. Elles nĂ©cessitent de grandes quantitĂ©s d’eau, gĂ©nèrent des rejets polluants, et prĂ©sentent un risque Ă©levĂ© pour les travailleurs.
Ces procĂ©dĂ©s contribuent aussi Ă la contamination des sols, des nappes phrĂ©atiques et de la chaĂ®ne alimentaire. En somme, recycler l’or des circuits imprimĂ©s revient souvent Ă Ă©changer une pollution contre une autre.
đź§Ş Une dĂ©sinfection au sel… qui dissout l’or
C’est ici qu’intervient une avancĂ©e prometteuse. Une Ă©quipe de chercheurs de la Flinders University (Australie) a publiĂ© en juin 2025 une Ă©tude dans Nature Sustainability dĂ©crivant un tout nouveau procĂ©dĂ© d’extraction de l’or, plus Ă©cologique et potentiellement recyclable Ă l’infini.
Leur mĂ©thode repose sur un ingrĂ©dient inattendu : l’acide trichloroisocyanurique, un composĂ© souvent utilisĂ© pour dĂ©sinfecter les piscines. Lorsqu’il est activĂ© par de l’eau salĂ©e, ce produit est capable de dissoudre l’or prĂ©sent dans les circuits Ă©lectroniques, sans nĂ©cessiter de substances hautement toxiques.
acide trichloroisocyanurique |
Mais ce n’est pas tout. Les chercheurs ont Ă©galement conçu un polymère organique riche en soufre, capable de sĂ©lectionner et capter l’or dissous tout en laissant les autres mĂ©taux de cĂ´tĂ©. Une fois l’or extrait, ce polymère peut se dĂ©composer de lui-mĂŞme pour libĂ©rer le mĂ©tal prĂ©cieux… puis ĂŞtre rĂ©utilisĂ© dans une nouvelle extraction. Une sorte de piège Ă or rĂ©versible et recyclable.
⚙️ Pourquoi cette innovation change la donne
Ce procédé présente plusieurs avantages majeurs :
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Pas de cyanure ni de mercure : les risques pour les humains et les écosystèmes sont fortement réduits.
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SĂ©lectivitĂ© Ă©levĂ©e : le polymère capte principalement l’or, mĂŞme au milieu d’autres mĂ©taux comme le cuivre ou le nickel.
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Réutilisation des matériaux : tant le solvant que le polymère peuvent être recyclés, ce qui limite les déchets.
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Applicabilité large : le procédé fonctionne sur les déchets électroniques, mais aussi sur les minerais ou les flux issus de laboratoires scientifiques.
Des tests pilotes sont en cours en partenariat avec des acteurs du recyclage et de l’industrie minière. Si cette mĂ©thode s’avère viable Ă grande Ă©chelle, elle pourrait marquer un tournant dans la manière dont nous rĂ©cupĂ©rons les mĂ©taux prĂ©cieux.
📉 Des limites à prendre en compte
Le tableau n’est pas entièrement rose. L’acide trichloroisocyanurique, bien que moins dangereux que le cyanure, reste un oxydant puissant, classĂ© comme toxique pour les organismes aquatiques. Sa manipulation Ă grande Ă©chelle nĂ©cessite des prĂ©cautions. Et si le procĂ©dĂ© consomme sans doute moins d’eau que les mĂ©thodes classiques, les quantitĂ©s exactes n’ont pas encore Ă©tĂ© publiĂ©es.
Par ailleurs, le coût de production du polymère, sa durabilité sur le long terme, et la rentabilité globale du procédé restent à évaluer en conditions industrielles. Autant de points qui détermineront si cette technologie peut réellement remplacer les solutions actuelles.
đź’ˇ Une « mine urbaine » Ă exploiter
Ce qui rend cette dĂ©couverte si importante, c’est qu’elle repose sur un changement de regard. Au lieu de fouiller la terre pour extraire des ressources toujours plus rares, pourquoi ne pas exploiter les dĂ©chets que nous avons dĂ©jĂ produits ?
L’idĂ©e de la “mine urbaine”, oĂą l’on rĂ©cupère mĂ©taux rares et terres rares Ă partir de produits usagĂ©s, gagne en crĂ©dibilitĂ©. Ă€ titre d’exemple, Ă 70 dollars le gramme, un kilogramme de circuits imprimĂ©s contenant 500 mg d’or reprĂ©sente 35 dollars d’or pur — sans compter l’argent, le cuivre ou le palladium Ă©galement rĂ©cupĂ©rables.
Avec des millions de tĂ©lĂ©phones et d’ordinateurs mis au rebut chaque annĂ©e, le potentiel Ă©conomique et Ă©cologique est considĂ©rable.
🔄 En attendant : que faire de vos vieux appareils ?
MĂŞme si le procĂ©dĂ© australien n’est pas encore gĂ©nĂ©ralisĂ©, vous pouvez dĂ©jĂ contribuer Ă un recyclage plus propre :
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Déposez vos appareils dans des points de collecte officiels (souvent en déchetterie ou dans les grandes enseignes).
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Renseignez-vous auprès des ferrailleurs locaux, certains rachetant les composants à forte valeur.
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Faites appel Ă des associations comme Goodwill, qui recyclent les composants tout en menant des actions sociales.
Recycler l’Ă©lectronique, c’est Ă©viter qu’elle finisse dans une dĂ©charge... mais c’est aussi peut-ĂŞtre, Ă l’avenir, transformer des tiroirs oubliĂ©s en filons prĂ©cieux.
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